Entrevue

Marie Christine Kramarenko, commençons par une question que l’on entend souvent. Est-ce que tout le monde est réceptif à l’hypnose ?

 

Globalement tout le monde a la capacité d’entrer en hypnose, car l’hypnose est un phénomène naturel commun à toute l’humanité : cela implique, cependant, que selon les personnes, notre aptitude s’exprime plus ou moins. C’est un apprentissage et donc au fur et à mesure des séances, cette faculté se déploie. Toute hypnose est autohypnose. La personne va faire quelque chose qu’elle sait faire depuis très longtemps et dont elle oublie de se servir pour s’aider.

 

Si la personne me semble moins réceptive, j’utilise d’autres alternatives. Dans tous les cas, l’hypnose n’est pas un état stable : on peut être dans une transe profonde ou dans un état d’hypnose léger. Il y a des nuances et ça ne nous empêche pas de bien travailler.

 

Il est important de préciser ou rappeler qu’il y a autant de façons de pratiquer l’hypnose que d’hypnothérapeutes, et que mon approche peut sembler différente d’un autre hypnopraticien. Entre le savoir-faire et le savoir-être, il y a le cheminement intérieur de chacun.

 

On entend beaucoup parler de l’hypnose au travers de spectacles associés à la magie, avec des personnes qui ont une véritable maîtrise certes, mais qui l’utilisent à des fins divertissantes. Qu’est-ce que vous répondriez à quelqu’un qui pourrait vous taxer de charlatanisme ?

 

Il y a un code de déontologie. Vous pouvez consulter mon parcours. J’ai un long travail personnel en psychothérapie/psychanalyse et lors de mes études à la Faculté Libre, la condition préalable indispensable pour suivre le cursus, était d’être suivie en psychothérapie, psychanalyse ou groupe de thérapie. J’ai fait ensuite des études d’hypnothérapie dans plusieurs écoles et c’est donc plus de 14 ans de travail de psychanalyse intégrative et de formation en hypnose avec, en parallèle, un important cheminement personnel.  Mais cela ne s’arrête pas pour moi avec la « validation » d’un cursus, je continue d’étudier, je continue d’apprendre. Le respect de la personne accompagnée est primordial.

 

Grâce à l’hypnose, vous accompagnez, intervenez, pour permettre à la personne de dénouer ses propres blocages, c’est bien ça ?

 

Tout à fait, je vais aider la personne à reprendre le pouvoir sur sa propre vie, sur ses mécanismes maladifs, afin qu’elle puisse opérer par elle-même les changements nécessaires en vue de son objectif et ce, dans cet état particulier qu’est l’hypnose.

 

Vous utilisez également les thérapies psychocorporelles, vous pouvez nous expliquer ?

 

Oui, cela fait partie de mes compétences. Quand il y a des décharges émotionnelles fortes (cela peut arriver), il faut savoir être là – calme et stable – et pouvoir accompagner la personne en toute sécurité. L’importance du travail personnel et de la thérapie de groupe, m’est ici un précieux recours, car cela peut être « physique ». Dans ces moments-là, mon expérience et mon vécu personnel des groupes de thérapie sont très utiles.

 

Cet apprentissage a été fait notamment avec la Bioénergie, le Psychodrame, la Gestalt-thérapie et cela teinte indéniablement ma façon de travailler. Je me suis nourrie de ces expériences profondes au cœur de la psyché et du corps, par l’expression émotionnelle avec toute sa palette de couleurs.

 

Dans votre parcours personnel, votre première démarche a été de vous tourner vers la psychanalyse si j’ai bien compris, mais vous avez toujours eu une sensibilité à la spiritualité, n’est-ce pas ?

 

Oui, et cela n’est pas contradictoire, bien au contraire. Une personnalité comme le psychanalyste Karl Gustav Jung incarne ce double aspect, raison pour laquelle je me suis très vite sentie en adéquation avec ce que l’on appelle la Psychologie des Profondeurs. La Nature m’a procuré depuis l’enfance ce sentiment d’appartenance à un Tout… et ma recherche se poursuit intensément dans ma pratique du Qi Gong.

 

Vous parlez également de « psychologie de l’énergie », de quoi s’agit-il ?

 

Il s’agit du terme qui définit une famille de pratiques réunissant le corps et l’esprit, et travaillant sur le champ d’énergie. Le but est de transformer par tapotements, stimulations sensorielles ou poses énergétiques des blocages liés à des situations de vie. Ce sont des techniques très efficaces dont certaines sont plus connues du public, telles l’EFT (Emotionnal Freedom Technique), l’EMDR (Eye Mouvement Desensitization and Reprocessing), mais il en existe d’autres que j’utilise.

 

Tout ce que vous évoquez ici est à rebours finalement avec la culture latine qui pose la maîtrise de la conscience au-dessus de tout quitte à rejeter le corps et ignorer l’inconscient. Et pour aller au bout de ça, vous utilisez également, parmi vos techniques, la méditation et les pratiques orientales.

 

Cela ne va pas à rebours, selon moi, mais agrandit et enrichit la notion d’être humain qui réside dans un juste équilibre de nos différents « corps », pour le moins ceux que tous connaissent : physique, mental, émotionnel.

 

J’ai débuté, avant mes études de psycho, par la pratique du zen japonais  avec le zazen (assise en silence : méditation). C’est dans ce calme de l’esprit, dans cette tranquillité que nous aurons une meilleure compréhension de la vie et un retour à l’équilibre. L’hypnose amène aussi à ce calme intérieur et le Qi Gong est, comme le définit un de mes maîtres : La Voie du calme.

 

Les pensées se ralentissent, la personne se détend et trouve son espace de paix, de calme. C’est important pour moi que la personne soit dans cette sécurité tant à l’extérieur par ma présence professionnelle et l’ambiance du lieu, qu’à l’intérieur dans son espace de tranquillité. C’est la base à assurer pour les avancées du travail, les chemins qu’elle va pouvoir emprunter pour aller aborder les choses qui sont moins tranquilles en elle.

 

C’est frappant de voir comment les mentalités ont évolué vis-à-vis de l’hypnose ou encore de l’acuponcture par exemple. Ce sont des pratiques qui sont rentrées dans les hôpitaux universitaires et les CHU désormais.

 

Oui, et il faut s’en réjouir. Il est heureux que le corps médical utilise l’hypnose pour faire face à la souffrance, soigner et aider à guérir ainsi qu’à augmenter l’effet curatif des pratiques et soins conventionnels.

 

Certaines pratiques difficilement cernables par les procédés scientifiques ont besoin de temps et aussi d’un intérêt sans parti-pris pour être étudiées et en rapporter l’efficacité.

 

C’est ce qui s’est passé pour l’hypnose. Je m’y suis intéressée parce que je cherchais finalement à comprendre certaines expériences d’états modifiés de conscience. Cela m’a amenée à faire des recherches notamment pour ce qui relève des phénomènes de transe. Ça m’a toujours passionnée.

 

Justement votre mémoire d’étude s’intitule « La transe en psychothérapie : l’hypnose ».

 

Tout à fait. J’ai cherché à comprendre ces phénomènes où l’on perd la notion du moi habituel, quotidien, pour embrasser une dimension tellement plus vaste.

 

Pour comprendre les différents états de transe, il n’y avait qu’une façon de m’en imprégner, les vivre, et l’hypnose fut une évidence pour moi alors que je terminais mon cursus. A ce moment (2006), l’hypnose était encore bien marginale et il y avait très peu de praticiens.

 

Parmi toutes ces expériences qui vous ont nourrie et enrichie, il y en a une que vous mettez aussi en avant, c’est le Qi Gong, vous pouvez nous en dire plus ?

 

Oui, là aussi, une évidence quant à mon parcours : j’ai cherché à approfondir la dimension énergétique et cette pratique est venue à moi naturellement pour mon propre bien-être, et lorsque j’en ai touché concrètement les effets bénéfiques, j’ai souhaité partager cet art avec d’autres, ceci, avec l’assentiment de mes maîtres. Je tiens à leur exprimer ma profonde et sincère gratitude.

 

Et le Qi Gong (ou travail avec le Qi – l’énergie –) fait déjà partie intégrante de mon activité, mais va se développer ! Hypnose et Qi Gong se pratiquent séparément mais aussi de façon intégrative (la pratique de l’une renforçant l’autre).

 

Le but sera aussi solidaire, de manière de permettre à des personnes ne pouvant venir me voir pour la relation d’aide par l’hypnose, de pratiquer une discipline magnifique et très aidante sur tous les plans.

 

Le Qi Gong est plus qu’une gymnastique de bien-être, c’est une sorte de méditation en mouvement qui va travailler notre corps physique et émotionnel, mais aussi notre souffle, notre concentration et bien entendu équilibrer la circulation énergétique pour nous ramener à un état naturel d’harmonie dont nous avons tous si besoin pour être heureux, nous sentir bien et en bonne santé.

 

En Chine, le Qi Gong est intégré totalement dans les moyens de traitements mis en œuvre par la Médecine Traditionnelle, au même titre que l’alimentation, l’acuponcture, et le soin par les plantes. Le Qi Gong est utilisé là-bas comme thérapeutique de prévention et curative.

 

Vous utilisez donc différentes techniques en cohérence les unes avec autres ?

 

Oui, je m’inscris dans une dimension holistique et la cohérence est indispensable pour le bien-être, quand elle est reliée à la dimension du cœur. Tout ce qui a nourri mon parcours va émerger de façon naturelle dans l’accompagnement humain que je propose. Il y a une dimension mystérieuse, impalpable qui se tisse entre les personnes pour amener le changement.

 

Pour résumer, je suis une sorte de catalyseur. Ce sont les personnes qui vont s’aider elles-mêmes et je vais faire de mon mieux pour les y amener de la meilleure façon qui soit pour amener le changement.

Par-delà le bien et le mal, il y a un champ – un espace – Et c’est là que je te rencontrerai.

Rûmi